Etat qualitatif des eaux souterraines

Surveillance de l’état qualitatif des eaux souterraines

La surveillance de l’état qualitatif des eaux souterraines au Grand-Duché de Luxembourg comprend plusieurs réseaux avec :

  • le réseau de la directive cadre eau (DCE)1,
  • le réseau de la directive nitrate2,
  • le réseau de la campagne pesticides,
  • et d’autres stations historiques.

Les réseaux de surveillance de la DCE (Pdf, 463 Ko) et de la directive nitrate (Pdf, 451 Ko) ont été modifiés en 2021 pour mieux répondre aux exigences des directives et sont composés respectivement de 38 et 29 stations, qui sont réparties entre les différentes masses d’eau souterraine du pays.

Le réseau de la campagne pesticides comprend 63 stations, qui sont en partie incluses dans les deux autres réseaux, et a pour but de suivre l’évolution des concentrations des produits phytopharmaceutiques dans les eaux souterraines.

Les stations de mesures sont des sources, des forages ou encore des puits.

Fréquence d’échantillonnage

Les stations de mesure sont généralement échantillonnées deux fois par an. La fréquence de suivi de certaines stations peut être plus soutenue, jusqu’à quatre fois par an, notamment lorsque les résultats d’analyses indiquent un mauvais état qualitatif ou encore lorsque les résultats fluctuent beaucoup d’une analyse à l’autre.

 

Photo 1 : Prise d’échantillons d’eau

Paramètres analysés et normes de qualité

La surveillance qualitative des eaux souterraines comprend entre autres l’analyse des paramètres suivants :

  • métaux,
  • pesticides et leurs produits de dégradation (métabolites),
  • nitrates,
  • hydrocarbures polycycliques aromatiques (HAP).

Le choix des paramètres analysés s’appuie sur la directive européenne « eaux souterraines » (2006/118/CE)3 transposée dans la législation nationale par le règlement grand-ducal du 12 décembre 2016 relatif à la protection des eaux souterraines contre la pollution et la détérioration4.

Les normes de qualité définies pour les nitrates et les produits phytopharmaceutiques correspondent aux normes en vigueur pour l’eau potable (limites de potabilité) et sont détaillées dans le tableau ci-dessous :

 

Paramètres

Norme de qualité

Nitrates (NO3 -)

50 mg/l

Concentration individuelle en pesticides

0,1 µg/l

Concentration totale (cumulée) en pesticides

0,5 µg/l

Tableau 1 : Paramètres et normes de qualité utilisées pour évaluer la qualité des eaux souterraines

 

En général, les valeurs seuils correspondent également aux limites de potabilité en vigueur pour l’eau potable, tout en tenant compte du contexte national, notamment de la composition chimique naturelle des différentes nappes d’eau souterraine. La liste des paramètres et des valeurs seuils sont présentées dans le tableau suivant :

 

Paramètres

Valeurs seuil

Chlorures (Cl-)

250 mg/l

Sulfates (SO42-)

250 mg/l

Nitrites (NO2-)

0,5 mg/l

Ammonium (NH4+)

0,5 mg/l

Arsenic (As)

10 µg/l

Cadmium (Cd)

1 µg/l

Mercure (Hg)

1 µg/l

Plomb (Pb)

10 µg/l

Phosphate-ortho-P

0,3 mg/l

Somme Tri-et Tetrachloroéthènes

10 µg/l

Conductivité

2500 µS/cm à 20⁰C

Tableau 2 : Paramètres et valeurs seuils utilisées pour évaluer la qualité des eaux souterraines

 

Etat qualitatif en 2021

L’état qualitatif desmasses d’eau souterraine , évalué en 2021 à partir du réseau DCE, montre que toutes les masses d’eau souterraine définies pour le Grand-Duché ont connu des dépassements des normes de qualité. Ces dépassements sont dus en grande partie à trois produits de dégradation de produits phytopharmaceutiques (métabolites) ou à la minéralisation des fertilisants utilisés principalement dans l’agriculture :

  • les métazachlore-ESA et OXA, dont la substance mère était utilisée jusqu’en 2015 comme herbicide sur les cultures de colza,
  • le métolachlore-ESA, dont la substance mère était utilisée jusqu’en 2015 comme herbicide sur les cultures de maïs,
  • le chlorothalonil-M-R471811, dont la substance mère était utilisée jusqu’en 2020 comme fongicide, notamment dans les cultures de céréales,
  • et les nitrates.

 

Photo 2 : Epandage de fumiers

Photo 3 : Pulvérisation d’herbicides

 

Il est cependant important de noter qu’un dépassement pour un paramètre ne signifie pas systématiquement que la ou les masses d’eau souterraine concernées sont considérées automatiquement comme étant dans un mauvais état selon la DCE.

Vous trouverez plus d’informations sur l’évaluation de l’état qualitatif des masses d’eau souterraine ici (Word, 18 Ko).

 

Au total, 16 stations montrent que les concentrations moyennes annuelles dépassent les normes de qualité pour un ou plusieurs paramètres. La masse d’eau souterraine du Lias inférieur est la masse d’eau la plus affectée avec 8 stations de mesures pour lesquelles un dépassement d’au moins une norme de qualité est à déplorer. Les nombres et les pourcentages des stations ayant connu un dépassement de la norme de qualité en 2021 par masse d’eau souterraines sont présentés dans le tableau ci-dessous.

 

Nombre et pourcentage de stations du réseau DCE où un dépassement de la norme de qualité a été constaté en 2021

Masses d'eau souterraine

Devon

Trias-Nord

Trias-Est

Lias inférieur

Lias moyen

Lias supérieur

Nombre de stations de surveillance par masse d'eau souterraine

5

9

5

14

2

3

Nitrate

absolu

0

1

1

2

0

0

pourcentage

0%

11%

20%

14%

0%

0%

Métazachlore-ESA

absolu

2

1

0

4

0

0

pourcentage

40%

11%

0%

29%

0%

0%

Métazachlore-OXA

absolu

0

0

0

1

0

0

pourcentage

0%

0%

0%

7%

0%

0%

Métolachlore-ESA

absolu

0

0

0

3

0

0

pourcentage

0%

0%

0%

21%

0%

0%

Chlorothalonil-M-R471811

absolu

0

1

2

5

1

1

pourcentage

0%

11%

40%

36%

50%

33%

Chlorothalonil-M-R417888

absolu

0

0

0

1

0

0

pourcentage

0%

0%

0%

7%

0%

0%

2,6-Dichlorobenzamide

absolu

0

0

1

0

0

0

pourcentage

0%

0%

20%

0%

0%

0%

Ammonium

absolu

0

0

0

0

1

0

pourcentage

0%

0%

0%

0%

50%

0%

Tableau 3 : Nombre et pourcentage de stations du réseau DCE où un dépassement a été constaté en 2021 par rapport à la norme de qualité décrite dans le règlement grand-ducal précité du 12 décembre 2016. Les dépassements sont marqués en gras et en rouge clair.

 

Au total, 3 des 6 masses d’eau souterraine du Luxembourg sont en mauvais état, à cause des concentrations en nitrates (provenant des engrais) et/ou en certains métabolites (produits de dégradation d’herbicides notamment utilisés sur les cultures de maïs et de colza), qui dépassent non seulement les limites de potabilité pour certains captages d’eau potable, mais également les normes de qualité fixées dans les législations et directives relatives à la protection des ressources en eau souterraine.

 

Carte 1 : Mauvais état de la moitié des masses d’eau souterraine au Luxembourg

 

Le détail des contaminations de certaines masses d’eau souterraines, en raison des concentrations en nitrates et en métolachlore ESA (produit de dégradation d’un herbicide utilisé sur les cultures de maïs) et en métazachlore ESA (produit de dégradation d’un herbicide utilisé sur les cultures de colza) est donné dans les documents PDF ci-dessous.

Evolution des concentrations

La tendance des concentrations en nitrates et en pesticides dépend de plusieurs paramètres :

  • les quantités et les fréquences d’utilisation des produits phytopharmaceutiques,
  • les propriétés de la substance (lessivage, durée de vie, etc.),
  • les propriétés de l’aquifère.

Certains produits phytopharmaceutiques ont été interdits par la législation luxembourgeoise ou par des décisions de la Commission Européenne au cours des 2 dernières décennies. Ces interdictions et mesures permettent déjà ou permettront à l’avenir de réhabiliter un certain nombre de sources et d'autres captages utilisés par le passé pour la distribution d’eaux destinées à la consommation humaine.

Les concentrations en certains métabolites varient énormément et certaines stations montrent une nette tendance à la baisse tandis que pour d’autres stations, les tendances sont à la hausse. Vous pouvez cliquer ici (Word, 30 Ko) pour plus d’informations sur la contamination des eaux souterraines par les produits phytopharmaceutiques et leurs métabolites.

 

Pour la majorité des stations de mesure, les concentrations en nitrates sont plutôt stables. Un exemple de l’évolution des concentrations en nitrates pour trois captages est donné ci-dessous :

Figure 1 : Evolution des moyennes annuelles (2007-2021) en nitrate au niveau stations de mesure du réseau DCE. Les traits pointillés rouge et orange représentent la norme de qualité, respectivement 75% de la norme de qualité.

 

 

1 Directive 2000/60/CE du Parlement Européen et du Conseil du 23 octobre 2000 établissant un cadre pour une politique communautaire dans le domaine de l'eau (Directive Cadre sur l'eau - DCE) : https://eur-lex.europa.eu/resource.html?uri=cellar:5c835afb-2ec6-4577-bdf8-756d3d694eeb.0001.02/DOC_1&format=PDF

2 Directive 91/676/CEE du Conseil du 12 décembre 1991 concernant la protection des eaux contre la pollution par les nitrates à partir de sources agricoles : https://eur-lex.europa.eu/legal-content/FR/TXT/PDF/?uri=CELEX:01991L0676-20081211&from=EN

3 Directive 2006/118/CE du Parlement Européen et du Conseil du 12 décembre 2006 sur la protection des eaux souterraines contre la pollution et la détérioration : https://eur-lex.europa.eu/legal-content/FR/TXT/PDF/?uri=CELEX:32006L0118&from=EN

4 Règlement grand-ducal du 12 décembre 2016 relatif à la protection des eaux souterraines contre la pollution et la détérioration : https://data.legilux.public.lu/file/eli-etat-leg-memorial-2016-256-fr-pdf.pdf