Aquifères

Définition des aquifères

Un aquifère est une structure géologique perméable contenant de l’eau issue de l’infiltration. Cette formation géologique est caractérisée par sa géométrie, superficie, profondeur, composition lithologique, porosité, perméabilité, fracturation et permet un stockage et un transit plus ou moins important et plus ou moins long de l’eau infiltrée pour permettre l'écoulement significatif d'une nappe souterraine et le captage de quantités d'eau appréciables (Gilli, 2008[1]).

Au Luxembourg, plusieurs aquifères, dont les extensions sont présentées sur la carte ci-dessous, sont aujourd’hui exploités pour la production d’eaux destinées à la consommation humaine.

 

Carte 1 : Localisation des aquifères principaux du Luxembourg et des captages d’eau potable

 

La carte met en évidence que de très nombreux captages d’eau potable sont situés dans la zone où l’aquifère du Grès de Luxembourg affleure (zone bleue). 75% de l’eau souterraine, qui est captée puis distribuée pour la consommation humaine par le biais des réseaux d’eau potable de vos communes, provient de cette formation aquifère du Grès de Luxembourg.

Malheureusement, la disponibilité des ressources en eau souterraine, qui ont une qualité et une quantité suffisamment intéressantes pour être captées et utilisées pour la consommation humaine, n’est pas du tout répartie de façon homogène et équitable dans le pays.

Ainsi dans la région géologique de l’Oesling, située au Nord du Luxembourg, très peu de ressources en eau souterraine sont disponibles en qualité et en quantité suffisantes, tandis qu’au centre du Gutland, on retrouve la majorité des ressources en eau souterraine, qui sont utilisées pour la distribution d’eaux destinées à la consommation humaine.

Les principaux aquifères, utilisés pour la production d’eaux destinées à la consommation humaine, au Luxembourg, seront présentés par âge décroissant, de l’aquifère le plus ancien, du Dévonien, à l’aquifère le plus récent, celui des alluvions.

Aquifère du Dévonien

La partie de l'Oesling, qui peut être qualifiée d’aquifère et qui est exploitée entre-autres par l'Administration communale de Wincrange par le biais de captages-sources pour distribuer des eaux destinées à la consommation humaine, correspond presque exclusivement aux zones d’altération du substratum, zones plus ou moins sablo-gréseuses, dans lesquelles les eaux pluviales peuvent circuler par le biais de fissures et de crevasses. Cette partie aquifère semble être limitée étant donné qu’au-delà d’une certaine profondeur, la roche est saine et compacte et ne permet ni l’infiltration, ni la circulation d’eau dans les formations géologiques. Les sources, résurgences naturelles des nappes de l'aquifère, présentent des variations de débits très importantes et peuvent même tarir en période estivale.

 

Photo 1 : Affleurement de schistes, de la formation géologique du dévonien (SGL)

Aquifère du Buntsandstein

La formation aquifère la plus ancienne du Gutland est le Grès bigarré (Buntsandstein).

Cette formation est constituée de dépôts continentaux et lagunaires, de roches gréseuses et conglomératiques en alternance avec des marnes.
 

Photo 2 : Affleurement de la formation géologique du Buntsandstein (SGL)

 

Cet aquifère est exploité principalement par le biais de forages pour l’approvisionnement en eau potable de plusieurs communes, telles que Bettendorf, Ettelbruck, Tandel et de syndicats, tels que la DEA, syndicat de Distribution d’eau des Ardennes, et le SEBES, Syndicat des eaux du Barrage d’Esch-sur-Sûre.

En effet, le syndicat DEA exploite les trois forages profonds, Roubricht, Ribbefeld et Bréimchen
qui font entre 172 et 195 mètres de profondeur et peuvent produire plusieurs milliers de m3/jour.

Les 5 forages du site Everlange, d’environ 150 mètres de profondeur, constituent une des solutions de secours du SEBES pour distribuer de l’eau destinée à la consommation humaine en cas de problèmes au niveau du barrage d’Esch-sur-Sûre ou en cas de pénurie d’eau avec un débit total d’exploitation pouvant atteindre près de 20.000 m3/jour.

L’aquifère est productif dans certaines zones et des investigations supplémentaires permettront d’améliorer la connaissance de ses caractéristiques hydrogéologiques dans d’autres zones, qui pourraient alors se révéler propices pour la production d’eaux destinées à la consommation humaine.

Aquifère du Muschelkalk

Le Grès coquillier du Muschelkalk inférieur, composé de dolomies gréseuses ou de grès dolomitiques avec intercalations de marnes, est un aquifère très limité et qui présente une productivité élevée uniquement très localement (Bintz, 19822), dans la région de Schieren ou encore de Mersch (forage Kiesel, de 28 m de profondeur permettant de prélever les eaux souterraine avec un débit de l’ordre de 400 m3/jour).

 

Photo 3 : Affleurement de la formation géologique du Muschelkalk (SGL)

 

L’aquifère du Muschelkalk supérieur contient la nappe la plus importante des régions de la Moselle et de la Sûre inférieure. L’aquifère est exploité par plusieurs fournisseurs d’eau potable, tels que :

  • le syndicat des eaux du Sud-Est, SESE, par le biais de plusieurs forages qui ont entre 70 m et 90 m de profondeur avec un débit total d’environ 2.000 m3/jour ;
  • le Syndicat intercommunal pour la distribution d’eau dans la région de l’Est, SIDERE, par le biais du forage Waldbredimus, de 125 m de profondeur, avec un débit de l’ordre de 600 m3/jour et le forage Doudboesch, de 127 m de profondeur avec un débit minimal d’une centaine de m3/jour,
  • l’Administration communale de Mompach, qui exploite entre autres le forage Boursdorf de 86 m de profondeur avec un débit d’environ 360 m3/jour et la source Girst avec un débit de l’ordre de 200 m3/jour.

De même que pour l’aquifère du Buntsandstein, l’aquifère du Muschelkalk supérieur est productif dans certaines zones et il est très probable que cet aquifère puisse être exploité dans d’autres zones pour la production d’eaux destinées à la consommation humaine.

Aquifère du Trias en faciès de bordure

Situé exclusivement au nord-ouest du Gutland, cet aquifère présente un faciès gréseux et conglomératique de couleur rouge (Benbrahim, 20043). Les eaux souterraines de l’aquifère s’écoulent aussi bien au travers des pores de la matrice rocheuse que le long des fissures.

 

Plusieurs captages, tels que les deux forages Brunnen 1 et 2 de l’Administration communale d’Ell et les deux forages Krëschtebierg 1 et 2, d’une profondeur comprise entre 100 et 140 m, ainsi que les sources Kuelemeeschter et Weierchen de l’Administration communale de Redange-sur-Attert permettent d’utiliser les eaux de l’aquifère du Trias en faciès de bordure pour l’approvisionnement en eau potable.

 

Dans la région de Redange-sur-Attert, l’aquifère semble particulièrement intéressant avec le débit total des forages Krëschtebierg 1 et 2 de l’ordre de 700 m3/jour, du même ordre de grandeur que celui de la source Kuelemeeschter.

 

Photo 4 : Affleurement du Trias en faciès de bordure (SGL)

Aquifère du Keuper 

Constitué principalement de dépôts continentaux et lagunaires (marnes, dolomies, gypse, grès, argile rouge, etc.), formés en zones de rivage ou dans une mer peu profonde, les formations géologiques du Keuper affleurent sur une majeure partie du Gutland et peuvent avoir une épaisseur de 150 mètres dans certaines zones (Benbrahim, 20044). Si l’épaisseur des formations géologiques du Keuper est importante, seule une petite partie, notamment la formation du Grès à roseaux du Keuper moyen, renferme une nappe d’une importance suffisante pour la production d’eaux destinées à la consommation humaine. La formation du Grès à roseaux est cependant peu épaisse avec une épaisseur maximale de 50 mètres et semble avoir une extension relativement limitée (Bintz, 19825 ).

 

Photo 5 : Grès du Keuper avec empreintes de plantes (Kelber, 2015)

 

Le forage Schwartz est utilisé par l’Administration communale de Mersch pour extraire les eaux souterraines de l’aquifère du Keuper moyen, principalement de la partie sablo-dolomitique des Grès à roseaux. Le forage, qui a une profondeur de 37 m permet le prélèvement des eaux souterraines à raison d’environ 300 m3/jour.

Aquifère du Lias inférieur

L’aquifère du Grès de Luxembourg du Lias inférieur est composé principalement de grès à ciment calcaire. Le Grès de Luxembourg présente une double perméabilité, poreuse et de fissure.

 

Photo 6 : Affleurement du Grès de Luxembourg à Luxembourg ville

 

Les eaux souterraines circulent dans l’aquifère par le biais des vides tels que les fissures, les diaclases, les crevasses et zones de dissolution du calcaire ainsi que les pores de la matrice rocheuse sableuse.

En fonction de la présence de ces vides, de leur connexion et de leur taille, les vitesses de circulation des eaux souterraines dans la matrice rocheuse peuvent fortement varier.

De très nombreuses sources au Luxembourg sont des résurgences naturelles de la nappe du Grès de Luxembourg. Plus de 50 communes au Luxembourg (Ville de Luxembourg, Administrations communales de Kehlen, Contern, Hobscheid, Berdorf, Echternach, etc.) et les syndicats d’eau potable SES (Syndicat des Eaux du Sud), SEBES (Syndicat des Eaux du Barrage d’Esch-sur-Sûre) et enfin la DEA (Distribution d’Eaux des Ardennes) captent les eaux du Grès de Luxembourg pour leur alimentation en eau potable.

75% des eaux souterraines utilisées pour la consommation humaine au Luxembourg proviennent de l’aquifère du Grès de Luxembourg, ce qui témoigne de la nécessité absolue de protéger cette ressource si précieuse !

Aquifères du Lias supérieur et du Dogger

Plusieurs aquifères peuvent être regroupés et considérés comme un aquifère multicouche en raison des exploitations minières qui ont eu lieu pendant des décennies et qui ont créé des interconnexions entre plusieurs formations géologiques, telles que le calcaire à polypiers, le minerai de fer, et le Grès supraliasique. En effet, ces trois aquifères se distinguaient et étaient séparés par des formations peu perméables avant l’exploitation du minerai de fer en souterrain et à ciel ouvert (Bintz, 1982).

La formation la plus récente et la moins profonde de l’ensemble est constituée de bancs calcaires à récifs coralliens avec des intercalations marneuses, qui sont les sédiments marins les plus jeunes du Luxembourg.

Le minerai de fer, surnommé « minette », se trouve plus en profondeur. IL est caractérisé par ses bancs calcareux et gréseux riches en oolithes ferrugineuses.

 

Photo 7 : Affleurement de la Minette (SGL)

 

Cet aquifère n’est que peu exploité, principalement en raison des anciennes activités minières, de la création de réseaux souterrains, du décapage des couches protectrices peu perméables qui recouvraient l’aquifère et d’éventuelles contaminations de ces eaux.

Le puits Waeschbour, exploité par l’Administration communale de la Ville d’Esch-sur-Alzette, permet le prélèvement des eaux souterraines de l’aquifère de la Minette avec des débits très variables pouvant atteindre environ 2.000 m3/jour.

Il est important de souligner que les activités humaines telles que les exploitations minières peuvent modifier parfois de façon irréversible les propriétés des aquifères. En effet, les excavations ont entrainé une augmentation considérable de la vulnérabilité de l’aquifère et d’importantes modifications des directions d’écoulement des eaux souterraines.

Aquifères des alluvions

Les alluvions des différents cours d’eau du Luxembourg se sont déposées au cours des dernières périodes de glaciation et sont relativement limitées en termes d’épaisseur et d’extension.

 

Photo 8 : Affleurement des alluvions (Michel, 2005)

 

Les alluvions peuvent, soit alimenter les cours d’eau, soit être alimentées en partie par ceux-ci en fonction des variations saisonnières et du niveau des nappes alluviales.

Le forage Weisen 3, exploité par l’Administration communale de la Ville d’Esch-sur-Alzette, ainsi que les 2 forages de l’Administration communale de Reisdorf sont des exemples de captages prélevant les eaux de différentes nappes alluviales pour la distribution d’eaux destinées à la consommation humaine.

En raison de leur grande vulnérabilité et de leur épaisseur et extension très limitées, les aquifères alluvionnaires du Luxembourg ne sont pas d’une grande importance.

 

1 E. Gilli, C. Mangan, J. Mudry. Hydrogéologie – Objets, méthodes, applications. 2ème Ed. Dunod, 2008 ;

2 J.Bintz, M. Frantz, J.J.Fried. Commission des Communautés Européennes. Bilan des ressources en eau souterraine du Grand-Duché de Luxembourg. Th. Schäfer Druckerei GmbH. 1982 ;

3 Benbrahim M. en collaboration avec le Service géologique des Ponts et chaussées, l’Administration de la gestion de l’eau, le Laboratoire Physique des radiations -Caractérisation hydrochimique détaillée des eaux souterraines du Luxembourg – Détermination de la composition chimique en fonction de la lithologie des aquifères, et des influences anthropiques – Rapport final – septembre 2004 ;

4 Benbrahim M. en collaboration avec le Service géologique des Ponts et chaussées, l’Administration de la gestion de l’eau, le Laboratoire Physique des radiations - Caractérisation hydrochimique détaillée des eaux souterraines du Luxembourg – Détermination de la composition chimique en fonction de la lithologie des aquifères, et des influences anthropiques – Rapport final – septembre 2004 ;

5 J.Bintz, M. Frantz, J.J.Fried. Commission des Communautés Européennes. Bilan des ressources en eau souterraine du Grand-Duché de Luxembourg. Th. Schäfer Druckerei GmbH. 1982 ;

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